L'amiral Duval traite de l'ouvrage de Thierry de Montbrial, Quinze ans qui bouleversèrent le monde , retenant trois thèmes dans cette somme : l'élaboration de l'Europe, la crise irakienne et les autres pays de « l'Axe du Mal », les relations franco-américaines ; y apportant ses commentaires personnels.
Il évoque ensuite le Ramses 2004 que vient de présenter le directeur de l'Ifri et son équipe rédactionnelle.
Parmi les livres - Ces « Quinze ans qui bouleversèrent le monde »
Tel est le titre du nouveau livre que vient de publier Thierry de Montbrial, directeur, comme chacun sait, de l’Institut français des relations internationales (Ifri) qu’il a fondé il y a maintenant près d’un quart de siècle (1). Cet ouvrage majeur nous est proposé un an seulement après celui que notre auteur avait intitulé « L’action et le système du monde » et que nous avons eu le privilège de présenter aux lecteurs de cette revue (2). Il s’agissait alors, rappelons-le, d’une recherche en profondeur pour mettre au point une méthode qui permette d’analyser le pourquoi, le comment et les perspectives de tous les conflits, qu’ils concernent la politique, la stratégie (au sens militaire du terme), les relations internationales ou l’économie.
C’est cette méthode, dont Thierry de Montbrial nous avait dit alors qu’elle résultait d’une recherche entreprise depuis très longtemps, qu’il avait donc déjà employée pour rédiger les chapitres intitulés « Perspectives », qui constituent chaque année l’introduction du Rapport annuel de l’Ifri, dénommé Ramses (pour Rapport annuel mondial sur le système économique et les stratégies). Nos lecteurs le savent bien, puisque nous avons eu le privilège de le leur présenter tous les ans depuis sa création en 1981. Or ce sont les « Perspectives » ainsi publiées depuis 1989 et jusqu’à cette année qui ont été rassemblées dans le présent ouvrage, en nous offrant ainsi le panorama de l’évolution récente du « Système du Monde » (pour reprendre la formule que notre auteur avait employée dans son précédent livre) ; et cela depuis la chute du mur de Berlin jusqu’à la fin de la guerre d’Irak, comme le précise son sous-titre : « De Berlin à Bagdad ». Il ne peut être question de tenter de résumer ici ce panorama mondial, puisqu’il nous est présenté à travers près de 450 pages de grand format. Aussi nous contenterons-nous de noter les perceptions que nous en avons retenues sur les trois sujets d’une brûlante actualité que sont la « construction » européenne, les suites de la guerre de la « coalition » contre l’Irak, et la « détérioration » des relations franco-américaines.
L’élaboration de l’Europe
Commençons donc par la difficile élaboration de la future Europe, dont Thierry de Montbrial est un expert de longue date, puisque, avant d’être le fondateur de l’Ifri, il avait été le premier directeur du « Centre d’analyse et de prévision » (CAP) du ministère des Affaires étrangères. C’est aussi, faisons-en la confidence puisqu’elle a un certain intérêt historique, un sujet qui nous tient à cœur depuis longtemps. En effet, étant né avant la guerre de 1914 et ayant par suite été élevé dans l’idée que l’Allemagne était « l’ennemi héréditaire », nous avons vécu notre « Chemin de Damas », lorsque, au début des années 50 et étant alors membre de la Délégation française au Standing Group de l’Otan qui siégeait alors au Pentagone, porte-à-porte avec les Joint Chiefs of Staff américains, nous avons été chargé du dossier de la CED ; ce qui nous a valu le privilège d’être le seul observateur non homme politique des « Accords de Paris » qui, après le refus du traité par le Parlement français, ont tenté d’en réparer les dégâts en créant l’UEO. Pour nous, il en fut alors fini de ce grand dessein d’une Europe « puissance » de dimension « mondiale », puisque composée d’États ayant une culture et une histoire communes, même si cette dernière avait été souvent agitée. D’autre part, restant à même, à travers ses partenaires du « Benelux », de tendre une main amie vers le Nord et en particulier à la Grande-Bretagne, amarrée à jamais aux États-Unis par ses special relationships, comme nous l’avions constaté au Standing Group ; et aussi vers le Sud et en particulier aux pays du Maghreb, avec l’assistance de l’Italie et plus tard de l’Espagne, quand elle serait devenue fréquentable.
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