La Grande Europe existe de « l’Atlantique à l’Oural » ; elle inclut donc la « Russie européenne ». Les auteurs appellent de leurs vœux la réunion d’une conférence internationale pour remettre de l’ordre sur le Vieux Continent, et prendre en compte avec l’OSCE la « sécurité paneuropéenne ».
Coopération et sécurité de la « Grande Europe »
Cooperation and security in ‘Greater Europe’
‘Greater Europe’ exists ‘from the Atlantic to the Urals’. And so it includes ‘European Russia’. The authors of this article argue for an international conference to sort out the present disorder and turbulence on the Old Continent and take into account, with the OSCE, the question of ‘pan-European security’.
La « Grande Europe » existe. Elle existe historiquement et géographiquement de « l’Atlantique à l’Oural », pour reprendre la formule du général de Gaulle. Et la Russie est, pour l’essentiel, partie prenante de cette « Grande Europe », voire de la « Très Grande Europe » évoquée par Yves Lacoste, avec la « Russie européenne ». Certes, la Russie est bien territorialement ce pays démesuré qui s’étend de la Baltique au Pacifique et qui peut, par suite, jouer un jeu oscillatoire entre l’Occident et l’Asie. Reste que ses réseaux essentiels, ses dynamismes les plus importants, sont en Europe, et ses échanges se font majoritairement avec ses voisins européens. Et si, donc, elle peut et elle doit, pour certains, être qualifiée d’« européenne » — avec Michel Strogoff — et d’« asiatique » — avec Gengis Khan — cette nation à cheval sur l’Europe et l’Asie est d’abord et surtout un État européen, à impliquer totalement dans le jeu européen.
L’après-guerre
Cette « Grande Europe » existe historiquement et géographiquement, mais elle a été — pour en rester à la période contemporaine — divisée en son sein après la Seconde Guerre mondiale : la France qui entend alors se prémunir contre un nouveau séisme sur le sol du Vieux Continent, provoqué par l’Allemagne, tente d’organiser la sécurité de l’Europe en s’alliant à la Grande-Bretagne : c’est l’objet du Traité de Dunkerque du 4 mars 1947. Toutefois, dès juillet 1947, ce n’est plus tant outre-Rhin que paraissent se dessiner les préoccupations pour demain que plus à l’est. En effet, l’URSS et les démocraties populaires refusent — contrairement aux pays de l’Europe occidentale — de bénéficier du Plan Marshall, vaste programme de relèvement économique financé par les États-Unis et de participer à l’Organisation européenne de coopération économique (OECE), créée en 1948 pour gérer cette aide, et qui devient en 1961 l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE). Dans le même temps, on a assisté à une « soviétisation » de l’Europe de l’Est. L’Union soviétique, qui atteint territorialement son apogée — retrouvant « l’enveloppe spatiale » qui était la sienne au XVIIe siècle — souhaite se doter du glacis qui lui a fait défaut face au IIIe Reich.
Le coup d’État communiste de Prague, le 25 février 1948, avive les inquiétudes des puissances de l’Europe occidentale. Elles cherchent à y répondre dans le cadre du Traité de Bruxelles du 17 mars 1948 (France, Royaume-Uni, Belgique, Pays-Bas, Luxembourg). Ce Traité est complété, avec l’adhésion de l’Allemagne et de l’Italie, par la signature des accords de Paris, le 23 octobre 1954, créant « l’Union de l’Europe Occidentale » (UEO). Le blocus de Berlin, commençant le 24 juin 1948, dura 323 jours. Cet événement consacra la division de l’Europe, symbolisée par le rideau de fer, la plaçant au cœur de l’affrontement des deux blocs (l’Ouest avec le Traité de l’Atlantique Nord, signé à Washington le 4 avril 1949, et l’Otan ; l’Est avec le Pacte de Varsovie, conclu le 14 mai 1955) et de la guerre froide de l’après Seconde Guerre mondiale.
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