Au moment où j’écris ces lignes, en octobre 1993, les personnalités et les experts de la commission de préparation du futur Livre blanc sur la défense ont accumulé depuis plusieurs mois une masse considérable d’informations et de réflexions et rédigé un rapport d’étape, dont je n’ai pas connaissance. Mon témoignage sera donc celui d’un observateur extérieur, dont le seul avantage est de bénéficier du recul du temps pour tenter de comparer la situation d’aujourd’hui à celle qui avait permis, en 1972, d’exposer la politique de défense de mon pays.

Le document qui avait été publié à l’époque sous l’autorité de M. Michel Debré avait eu, entre autres mérites, celui de l’exhaustivité. Il définissait la politique de défense comme une partie essentielle de la politique générale de la France. Il précisait les stratégies militaires, leurs objectifs et leurs moyens. Il établissait enfin un certain nombre de règles et de méthodes destinées à moderniser la gestion des ressources, l’équipement des forces et la préparation de l’avenir.

Ce document d’une importance capitale a servi de référence pendant près de vingt ans, parce qu’il reposait sur des principes stratégiques qui sont restés valables tant que la situation internationale a été dominée par l’affrontement Est-Ouest. Cependant, sa cohérence n’a cessé de se dégrader au fil des années, des pans entiers ont été négligés ou démantelés.