Les médias sont devenus indispensables, ils sont entrés dans la vie de chacun et quoi qu’ils annoncent, il en reste toujours quelque chose ! D’où le danger de la déformation, de la désinformation, de la manipulation. Nous sommes particulièrement heureux que ce soit un journaliste qui appelle l’attention de nos lecteurs sur l’interprétation qui doit être faite des événements que les médias nous présentent.
L'événement international et les médias
Contrairement à ce qu’on aurait tendance à supposer, les excès de la médiatisation de l’actualité internationale sont largement antérieurs aux bouleversements géopolitiques de 1989-1991. Certes, l’opération américaine à Panama (1989), la chute du régime Ceausescu (1989), le conflit du Golfe (1990-1991), l’ingérence en Somalie (1992), ont illustré grandeur nature les méfaits de la mise en scène télévisée et la confusion entretenue entre spectacle et information. La décennie 70 avait été riche en boursouflures (Watergate, 1972-1974 ; guerre civile du Liban dès 1975, entre autres), et la décennie 80 avait illustré à l’envi les exagérations de la presse grand public. Qu’on se rappelle la « bataille des euromissiles » (1979-1983), la « diplomatie des sommets », l’exploitation des « navettes » au Proche-Orient, les voyages inopinés du président Mitterrand (Beyrouth, 1983 ; plus tard, Sarajevo), l’action des organisations non gouvernementales (Afghanistan, corne de l’Afrique, Amérique centrale…), le quasi-culte rendu dans certains pays à Mikhaïl Gorbatchev (gorbymania), la « guerre des pierres » dans les territoires occupés (à partir de 1987), le printemps de Pékin (1989).
Manifestement, de témoin professionnel, le journaliste voulait se changer en acteur, en justicier (affaires de l’Irangate, du Rainbow Warrior), voire en citoyen à part jouissant de droits exorbitants. Ce dernier point traduit d’ailleurs une évolution durable : individu hors du commun, l’homme de presse profite en effet d’un statut exceptionnel bien qu’officieux. Ainsi, détenu comme otage, voit-il aussitôt ses confrères provoquer ou impliquer l’État pour exiger ou hâter sa libération ; brandissant l’impératif de « transparence », il use de moyens déloyaux ou illégaux ; aimant la révélation pour elle-même, il se fait souvent complice du viol du secret de l’instruction, avec la connivence éventuelle de ceux qui y sont tenus (policiers, magistrats…).
Bref, pour le meilleur et pour le pire, les systèmes de presse occidentaux sont devenus des réalités déconcertantes : la traduction journalistique des événements internationaux devient sujette à caution et objet de polémique, au point qu’un chercheur du CNRS, visionnant en 2030 une suite de journaux télévisés de 1997, serait bien en peine de reconstituer la vie internationale de l’époque, tant l’hypertrophie de la nouveauté est devenue un genre en soi. Raison de plus pour évaluer ces pouvoirs biaisés des médias. Quelle typologie sommaire peut-on en dresser ? La couverture sur place de l’actualité n’aboutit-elle pas fréquemment à une déformation ludique du réel ? et quel crédit apporter au poids des fameuses « opinions publiques », redoutées par les responsables politiques, toujours évoquées avec révérence, et renforcées par l’essor des réseaux informatiques (Internet) ?
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