À propos de l'ouvrage de A.W. De Porte, Europe between the Super Powers. The enduring balance, Council on Foreign Relations, Yale University Press, 1979.
À propos de l'ouvrage de A.W. De Porte, Europe between the Super Powers. The enduring balance, Council on Foreign Relations, Yale University Press, 1979.
Rares sont les analyses des événements internationaux qui les interprètent en les situant, comme il convient, dans leur contexte historique – dans la longue durée – qui seul leur donne un sens. De même qu’une phrase isolée du discours prête à malentendu, une séquence limitée des rapports internationaux, qu’il s’agisse de la guerre ou de la paix, de la détente ou de la tension, ne trouve son explication qu’à travers sa remise en place dans le cadre historique approprié. D’où l’intérêt exceptionnel de l’ouvrage que vient de publier A.W. De Porte. Diplomate, affecté par le département d’État aux études prospectives, il a dû – et su – prendre du champ à l’égard du quotidien, pour embrasser l’actualité d’hier dans une large perspective. L’originalité et le mérite de A.W. De Porte viennent de ce qu’il ne se contente pas de décrire le « système » qui s’est constitué après 1945 par l’encadrement de l’Europe par les deux superpuissances, États-Unis et Union Soviétique. Il rappelle en quoi consistait le système antérieur des États européens qui, dans l’accord ou la violence, a commandé pendant quatre siècles, du début du XVIe au début du XXe, aux destinées de notre continent. Ce système se fondait sur un relatif équilibre des forces entre les États européens, en sorte que les tentatives d’hégémonie de l’un d’eux étaient vouées à l’échec par la coalition des autres. Tel fut successivement le sort de l’Espagne, de l’Autriche et de la France. La politique ou la force militaire étaient les moyens d’un jeu de bascule qui réussissait à maintenir ou à restaurer un équilibre relatif entre les protagonistes.
Mais la règle du jeu fut faussée à partir de 1870, lorsque le jeune État allemand se mit de la partie. La règle du jeu ne s’appliquait plus parce que l’Allemagne était à tous égards trop puissante pour pouvoir être contenue par une coalition des autres États européens. En sorte qu’entre 1870 et 1914, le système européen s’était tout simplement dissous, et qu’il ne fut pas restauré par les règlements de 1918.
Cette dislocation des fondements du système européen « classique », De Porte la fait apparaître par quelques données statistiques. De 1870 à 1914, la population de la France, de l’Allemagne et de la Grande-Bretagne a évolué comme suit : de 36 à 39 millions (France métropolitaine), de 40 à 65 millions (Allemagne), de 31 à 45 millions (Grande-Bretagne). Entre 1880 et 1913, la production de fer et métaux ferreux (en millions de tonnes) des trois pays a évolué comme suit : France de 1,73 à 5,21 – Allemagne de 2,47 à 16,76 – Grande-Bretagne de 7,87 à 10,42. Au cours de la même période (1880-1913), la production d’acier en millions de tonnes est passée de 0,39 à 4,69 (France), de 0,73 à 17,60 (Allemagne), de 1,32 à 7,79 (Grande-Bretagne). De 1870 à 1914, les dépenses militaires (en millions de dollars) de la France, de l’Allemagne et de la Grande-Bretagne sont passées de 110 à 287 (France), de 54 à 554 (Allemagne), de 116 à 384 (Grande-Bretagne).
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Octobre 2025
n° 883
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