Dans le domaine international, les causes classiques de désordre sont bien connues. Elles se sont aggravées. Certains États font preuve d'un nationalisme exacerbé. D'autres, ou les mêmes, n'hésitent pas à recourir à la plus grande violence pour faire triompher ce qu'ils jugent être leur bon droit. De nouveaux acteurs récemment apparus sur la scène mondiale n'ont pas toujours le sens des responsabilités que donne l'expérience. Outre les États, s'y manifestent désormais un foisonnement d'organisations (institutions mondiales ou régionales, ONG, multinationales). Les rééquilibrages démographiques prennent une importance grandissante. Des idéologies restent menaçantes pour l'ordre traditionnel. Les progrès techniques permettent d'accroître des propagandes partiales à une échelle jamais égalée.
Des désordres nouveaux apparaissent. Institutions et gouvernements se montrent trop souvent usés ou impuissants. Tout un univers mafieux s'installe sous différentes formes. Des puissances émergentes contestent l'ordre mis en place par les Occidentaux. L'esprit de compétition, manifesté notamment par la dérégulation, perturbe l'activité économique. On se met à préférer venir à bout des crises au coup par coup plutôt que d'établir un ordre qui les prévienne. Une certaine dose de désordre n'en est pas moins nécessaire pour permettre des changements non pas seulement par degrés mais par nature. Mais quelle dose ? L'apprécier est tout l'art de la politique.
Il paraît qu’un « nouvel ordre mondial » a été mis en place au début de la décennie passée. Cet ambitieux slogan cache mal l’hégémonie d’une puissance, dont le rival a disparu en même temps que la guerre froide. Que la situation se traduise désormais par un essai de régulation idéologique et économique, quand elle n’est pas militaire, est une évidence. Encore laisse-t-elle un vaste champ d’expansion à ce qu’on pourrait appeler un « nouveau désordre mondial ».
En réalité, notre époque est grosse de désordres pour ainsi dire désordonnés. Leur accumulation et leur caractère erratique sont dus à la fois à la persistance, sinon à l’amplification, de causes anciennes et à l’apparition de causes nouvelles.
Les causes traditionnelles de désordre persistent et se renforcent
Les changements de société n’ont pas fait disparaître, comme par enchantement, le désordre international. On ne voit pas pourquoi, en effet, les causes classiques de désordre entre les États se seraient évanouies puisque, pour l’essentiel, elles sont liées à une volonté de puissance, inhérente à la nature des collectivités sinon des individus. C’est ainsi qu’en dépit de généreuses déclarations de principes nous nous apercevons tous les jours que les groupements régionaux ne sont pas encore assez vivaces, y compris en Europe, pour effacer, au profit d’intérêts collectifs plus ou moins esquissés, des intérêts nationaux dont la perception se transmet de génération en génération.
Les causes traditionnelles de désordre persistent et se renforcent
Des désordres modernes apparaissent
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