Critiquée pour son absence de clarté depuis sa prise de fonction, l'Administration Bush multiplie, depuis les attentats du 11 septembre, des signes permettant de déchiffrer une stratégie d'ensemble. Ainsi, la doctrine nucléaire semble-t-elle sur le point d'être redéfinie en profondeur, à la fois pour répondre à des impératifs guidés par l'environnement stratégique, mais également en raison de la présence dans l'administration d'acteurs qui défendent une nouvelle ligne stratégique.
Une nouvelle doctrine nucléaire américaine ?
Depuis l’entrée en fonction de George W. Bush en janvier 2001, le secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld a engagé une large réflexion sur les priorités américaines en matière de défense pour le XXIe siècle. En moins d’un an, trois études importantes furent ainsi réalisées à sa demande (1). Si cet activisme traduit la volonté de l’équipe républicaine de s’affirmer en matière de politique de défense, il marque également sa détermination à rompre avec les orientations stratégiques des précédentes Administrations. La Nuclear Posture Review, qui précise sa position en matière d’armes nucléaires, est sur ce point édifiante : remises en janvier 2002 au Congrès, ses conclusions préconisent une véritable réorientation de la doctrine nucléaire américaine. À ces travaux du Pentagone viennent s’ajouter des rapports de la CIA sur la prolifération d’armes de destruction massive, ainsi que de multiples déclarations officielles confirmant qu’une nouvelle stratégie se met en place, et remet totalement en cause la politique nucléaire américaine.
Renforcée par les événements du 11 septembre, cette nouvelle posture est l’expression de la volonté de l’Administration Bush d’agir plus librement sur la scène internationale, en se débarrassant des contraintes héritées de la guerre froide. La rencontre entre MM. Bush et Poutine en novembre 2001, et la tenue d’autres sommets bilatéraux en 2002 sur les questions de désarmement et de partenariat stratégique, illustrent cette tendance déjà amorcée en 2001. C’est ainsi que les deux anciens adversaires ont officialisé, le 25 mai 2002, la signature d’un traité bilatéral, reprenant fidèlement les propositions de l’Administration Bush formulées depuis déjà plusieurs semaines.
La guerre froide est obsolète
Après les attentats de New York et Washington, et profitant d’une cote de popularité sans précédent (2), le président Bush a porté son attention, en marge de la lutte contre le terrorisme, sur le traité ABM de 1972, qu’il n’a pas hésité à qualifier d’obsolète et dangereux. De même, le département à la Défense estime que même les essais déjà effectués (notamment l’utilisation de radars pour détecter les missiles de longue portée) sortent du cadre du traité. Dès lors, plutôt que d’en modifier les termes, ce qui serait s’engager dans de longues concertations tant internes qu’extérieures, il est jugé préférable de quitter le traité de façon unilatérale.
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