L'idée de « gap transatlantique » fait partie de la rhétorique habituelle de l'administration américaine à l'égard de ses alliés européens. Elle trouve aujourd'hui un écho, renforcé par les décisions du sommet de Prague, d'adopter le concept américain de Nato Reaction Force (NRF) et de créer sur le territoire des États-Unis l'Allied Command Transformation (ACT) comme deuxième commandement stratégique de l'Alliance. Si les faits eux-mêmes (écarts en termes de budgets, de technologies et de capacités) sont indiscutables, il convient cependant d'être prudent avec l'instrumentalisation qu'en fait, consciemment ou non, Washington. L'adoption de l'idée de gap, telle que nos partenaires américains s'en font l'avocat, pourrait en effet conduire à un accroissement progressif des liens de dépendance et à une évolution forte des cultures stratégiques européennes.
Que faire du gap transatlantique ?
À force de postuler le « gap transatlantique » et de prodiguer conseils ou injonctions à leurs alliés européens, les États-Unis ont fini par développer chez ces derniers un certain sentiment de culpabilité. Pourtant, si l’écart quantitatif et qualitatif entre capacités militaires européennes et américaines n’est pas discutable, il convient d’observer avec circonspection l’instrumentalisation qui en est faite et de s’interroger sur la qualité des prémisses du raisonnement de nos partenaires.
De gap, en effet, il ne saurait y avoir qu’entre « fins » et « moyens », qu’entre projet stratégique et capacités de sa mise en œuvre. Accepter, sans réserve d’inventaire, l’idée du « gap transatlantique » serait admettre que le modèle américain fixe les règles et qu’il y a, de part et d’autre de l’océan, identité du projet stratégique.
Cela demande, au moins, réflexion : la référence américaine est-elle aujourd’hui totalement pertinente pour l’appareil de défense européen ?
Il reste 95 % de l'article à lire
Plan de l'article






