La recherche « stratégique » au sens large, est en Belgique très peu représentée. Elle est parcellaire, dispersée et fortement marquée par les écoles de pensée des relations internationales et le différentiel de posture entre communautés linguistiques. Le peu d'intérêt de l'opinion publique et des décideurs politiques pour ces matières devrait amener à terme le regroupement des chercheurs au sein d'une structure réunissant les deux grands pôles que sont l'Institut royal des relations internationales (Irri) d'un côté, et l'ERM/IRSD/CED de l'autre, sous la forme de réseaux pluridisciplinaires ouverts aux universités.
La recherche « stratégique » en Belgique
Il n’existe pas en Belgique d’équivalent aux grands outils américains que sont par exemple la Rand Corporation, Brookings Institution, Carnegie, Stimson Center, CSIS ; ces think tanks puissants et influents qui mettent en œuvre des centaines de chercheurs et des moyens considérables. On peut même affirmer que dans le Royaume, nous ne pouvons trouver l’équivalent des centres de recherche stratégique français : l’Ifri, la FRS, l’Iris, l’ISC, le Ceri et autres centres de réflexion (1).
La très petite taille du pays, les divergences communautaires, la pénétration et la diffusion très large des publications étrangères, la modestie des moyens engagés dans une matière — défense et relations internationales — qui ne recueille pas un large intérêt chez le citoyen belge sauf lorsque des crises l’interpellent, peuvent expliciter cela. Posture qui peut dissimuler aussi la difficulté, insurmontable encore aujourd’hui en Belgique, à fédérer la recherche « stratégique » en regroupant les acteurs francophones et néerlandophones, civils et militaires, ainsi que les diplomates afin de créer une sorte de Clingendael (Pays-Bas) (2). Faut-il voir dans cette impossibilité un problème de communautés politiques et linguistiques ne souhaitant pas voir un organe de niveau fédéral prendre de l’envergure.
Cette situation impose parfois aux quelques rares chercheurs belges travaillant sur ces matières à « s’expatrier » ou, à tout le moins, d’exporter leurs productions vers des publications francophones françaises et canadiennes, ou des revues spécialisées anglo-saxonnes. Elle a aussi pour conséquences un éparpillement des forces et la faiblesse des subventions publiques. Dès lors, nous ne pouvons être étonnés que la recherche « stratégique » en Belgique soit parcellaire, quasi absente si nous nous référons au sens étymologique du terme. Seuls les travaux de certains membres du Réseau multidisciplinaire d’Études stratégiques (RMES) se rapprocheraient de cette définition. La recherche sur la sécurité-défense, plus ouverte, opère par contre en majorité dans le champ des relations internationales et est, en partie, influencée par la pensée irénique des ONG et l’approche idéaliste fortement représentée en Flandre. L’école néo-réaliste est aujourd’hui, en Belgique, considérée par certains comme « politiquement incorrecte ».
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