Les engagements idéologiques animant ceux qui n’acceptent pas nos sociétés démocratiques et nos valeurs sont à prendre en considération avec la plus grande vigilance dans nos réflexions aujourd’hui. Face à ceux qui pratiquent une guerre d’influence visant à inhiber la volonté des démocraties à agir, le Livre blanc n’aborde qu’une partie des réponses en faisant plutôt effort sur les dimensions informatique et technologique, négligeant le combat des idées et de la perception à mener contre les acteurs de violence. Cet article propose qu’une stratégie d’influence globale soit désormais planifiée et conduite au sein du Conseil de défense et de sécurité nationale.
Livre blanc et stratégie d'influence : une réflexion incomplète et pourtant nécessaire
La globalisation de l’information permet à tout acteur, étatique ou non, d’exercer une influence sur le processus décisionnel d’une démocratie. Préserver ou être capable de soutenir les conditions politiques d’un engagement militaire est un préalable indispensable à la réussite d’une opération qu’elle soit une projection de puissance ou une projection de forces. Pour satisfaire ce préalable, une démocratie doit développer une stratégie d’influence qui vise à persuader tout décideur allié, neutre ou opposé que les objectifs et les modes d’action choisis pour atteindre le volet militaire de l’état final recherché sont légitimes, pertinents, crédibles et efficaces. Avant, mais aussi pendant ou après un conflit, elle agit dans les champs de la compréhension et de la perception des individus ou des entités pour contribuer à construire une situation favorable, prévenir aussi une décision défavorable aux intérêts nationaux sinon d’une coalition.
Cette capacité à influencer les cibles identifiées (autorités civiles et militaires, leurs conseillers proches, segment d’une population…) s’exerce dans un environnement informationnel qui se définit comme un espace virtuel et physique dans lequel l’information est reçue, exploitée et diffusée. La notion d’information comprend aussi bien l’information elle-même que les systèmes d’information. Les différents acteurs d’une crise ou d’un conflit y interviennent pour entraver ou soutenir la stratégie choisie. Les enjeux en sont, non seulement la crédibilité par exemple de la France ou de la coalition dont elle peut faire partie, mais aussi l’expression indirecte de sa puissance en appui de sa politique étrangère dans tous ses aspects : diplomatie, économie, emploi de ses forces armées, etc.
Cependant, le Livre blanc reste incomplet sur cette dimension de la puissance bien que les orientations sur les capacités d’influence de la France au service de ses intérêts de sécurité et de défense soient identifiables. Elles mériteraient d’être prolongées pour anticiper ou répondre d’une manière globale, avec les capacités nécessaires, aux agressions menées à travers l’environnement informationnel. Celui-ci comprend certes le cyberespace évoqué dans le Livre blanc, vision réductrice et technicienne de la « guerre de l’information », mais surtout la nécessaire élaboration d’une stratégie pour construire une perception positive des actions de la France dans une société de communication mondialisée. Après avoir rappelé brièvement le corpus doctrinal existant aujourd’hui, les orientations identifiées du Livre blanc dans l’environnement informationnel seront rappelées avant d’exprimer quelques propositions nécessaires à l’application d’une stratégie d’influence.
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