Les États-Unis, l’Otan, les pays européens élaborent en ce début de siècle de nouvelles stratégies de défense, en réaction aux attaques toujours plus nombreuses subies dans le cyberespace, à l’élévation du niveau d’intensité de la cybercriminalité, et face aux risques de déstabilisation que représentent ces nouveaux fléaux pour nos sociétés. Les représentations intellectuelles de la « menace » qui servent de base à ces modèles de sécurité sont-elles les bonnes ? La tendance au catastrophisme ne fausse-t-elle pas l’analyse ? Est-elle à l’origine de la tendance à la militarisation de la question de la sécurisation du cyberespace ?
Cybersécurité et cyberdéfense : quelles menaces contrer ?
Le monde s’émerveille depuis plus de vingt ans devant les pouvoirs des « technologies de l’information et de la communication », leurs capacités révolutionnaires à tout mettre en relation (individus, machines, institutions, nations, et pourquoi pas bientôt les planètes) pour le plus grand bienfait de l’économie, de la connaissance, de l’humanité. L’on reconnaîtra dans ce monde émerveillé et souvent intéressé, les adeptes de l’« e-économie », ceux des réseaux sociaux, ceux de la « liberté » d’agir (échanger, diffuser, donner, vendre, communiquer) et de penser ; tout simplement le simple citoyen communiquant, fixe ou mobile selon qu’il est ou non accroché à un câble, mais quoi qu’il en soit devenu citoyen du monde.
Alors que la quasi-majorité de la planète rêve de profiter paisiblement de cette nouvelle liberté, certains esprits mal intentionnés voudraient au contraire faire basculer ce monde idyllique vers l’enfer. On reconnaîtra là les mauvais génies de la planète Internet, et leur catalogue chaque année plus fourni de méfaits, dont la liste exhaustive ne tiendrait probablement pas en ces quelques pages. Citons alors, un peu comme tout cela vient dans les articles, rapports, commentaires qui foisonnent sur le net, c’est-à-dire au hasard : les cyberterroristes, les cybercriminels, les cyberdélinquants, les cyberfraudeurs, les cybermafias, les cyberguerriers, sans oublier la cybersurveillance au service des États totalitaires.
Tous ces acteurs font peser des menaces dont, à en croire les « experts », le commun des mortels connecté benoîtement ignore bien sûr l’existence et la gravité : intrusion dans les ordinateurs, vol de données confidentielles (numéros de cartes bancaires, de sécurité sociale, de téléphone…), vol de données secrètes, fraude, usurpation d’identité, détournements de fonds, blanchiment d’argent, attaques DDoS, spamming, phishing (là le commun des mortels ne comprend déjà plus rien) ; pire encore menaces de déstabilisation, de cyber-espionnage, de cyberconflits, de cyberguerres, de cyberattaques, de cyberattentats, de guerre de l’information (à ce stade, même des experts ne comprennent plus tous les mots).
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