Politique et diplomatie - La dernière croisade de l'Occident
En cette fin du XXe siècle, l’Occident, sans en être conscient, semble-t-il, s’est engagé dans une nouvelle croisade, celle des droits de l’homme ; car il s’agit bien de croisade. Pour l’Occident, les droits de l’homme constituent la vérité, le bien. L’histoire garde un sens, celui du droit au bonheur, de l’épanouissement de l’individu. L’effondrement des communismes, l’échec des expériences tiers-mondistes ne s’expliquent-ils pas par l’embrigadement des hommes, ceux-ci abdiquant tout esprit d’initiative et s’en remettant totalement à la collectivité ? Les sociétés les plus avancées ont besoin d’imagination, de souplesse, de flexibilité ; les droits de l’homme, en organisant et en protégeant l’égalité des chances et la liberté de chacun, fournissent le cadre juridique indispensable à cette adaptation permanente.
Par ailleurs, la démocratie est le fondement de la légitimité politique en Occident. Or toute démocratie, régime en principe pacifique car n’agissant qu’avec le consentement de l’opinion, ne se considère véritablement en sûreté que si elle est entourée d’autres démocraties. Tel est le principe kantien de « la paix par le droit » : une paix authentique implique des États adhérant aux mêmes valeurs de négociation, de respect des procédures, de recours à l’arbitre ou au juge en cas de litige. Dans le monde de l’après-guerre froide, pour les démocraties occidentales, procédant toutes à un désarmement important et donnant la priorité à la compétition économique, la paix mondiale passe par l’universalisation de la démocratie, la conversion de tous les États aux mêmes règles du jeu. Ainsi, la question des droits de l’homme condense les rivalités, les conflits idéologiques de cette fin du XXe siècle : l’occidentalisation de la planète triomphe ; et, de ce fait même, le monde échappe à l’Occident.
Pourquoi cette croisade ?
Pourquoi se lance-t-on dans une croisade ? Par certitude de détenir la vérité ? Ou par doute intime sur ses convictions, la croisade devant redonner toute sa force à la foi évanouie ? L’Occident, en promouvant les droits de l’homme, croit-il en eux ou masque-t-il une incertitude profonde ?
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