L’idée de la bataille décisive, qui a réellement pris corps au XIXe siècle, influence encore notre façon de penser la guerre. Si cette idée nourrit nos mythes fondateurs et repose sur notre culture philosophique hellénistique, elle n’en demeure pas moins limitative et nous conduit dans des impasses stratégiques. Il apparaît alors nécessaire de repenser les conflits armés comme des « transformations » de rapports de force. En s’appuyant sur la notion de « propension », au sens de la philosophie orientale, sur les forces morales dans le temps long et sur l’importance de la puissance politique, nous pourrons alors réellement transcender l’idée de la bataille décisive et affirmer ainsi que « tout est politique ».
Tout est politique : transcender l’idée de la bataille décisive
« La guerre n’est jamais quelque chose d’absolu dans son résultat. » Carl von Clausewitz, De la guerre, 1832.
La France a perdu une bataille ! Mais la France n’a pas perdu la guerre ! » Au-delà du célèbre en-tête de « l’Appel à tous les Français » (1), à jamais dans nos esprits comme le refus de la défaite et le point de départ de la « France libre », le général de Gaulle ne nous aurait-il pas aussi transmis l’idée qu’il n’y a finalement pas de bataille décisive, quelle que soit l’ampleur de la débâcle ? Et que dire de la défaite de juin 1940 où nous fûmes « submergés par la force mécanique, terrestre et aérienne, de l’ennemi » (2) ? Paradoxalement, il s’avère que cette idée paraît encore aujourd’hui assez étrangère à notre grammaire stratégique où nous sommes généralement à la recherche d’un point de rupture chez nos adversaires. L’avons-nous réellement atteint un jour, ou ne sommes-nous pas finalement dans la quête perpétuelle d’une chimère insaisissable par nature, d’autant plus, face au développement des technologies et de la numérisation des sociétés qui confèrent à l’information une valeur stratégique exceptionnelle ? Le général Thierry Burkhard, chef d’état-major des armées, souligne qu’il n’y a pas de victoire décisive dans ce domaine (3). C’est ainsi que nous pouvons y observer la volonté de nos compétiteurs d’agir sur les perceptions en déployant des stratégies de long terme.
C’est bien avec une approche plus politique, telle que le général de Gaulle a pu réellement l’incarner au mois de juin 1940, que l’issue d’une bataille ne peut effectivement pas apparaître comme définitive et ainsi décider de l’issue d’une guerre ; mais alors, si les batailles ne décident pas de la guerre, d’une manière un peu réductrice nous pourrions nous demander comment atteindre les buts de guerre ? Il s’agit donc d’explorer plus en détail ce qui est à l’œuvre, notamment à la charnière entre les niveaux politique et militaire, de comprendre la place de la bataille dans « l’affrontement des volontés » cher à Clausewitz, pour tenter d’apporter une solution au sempiternel hiatus entre les issues plus tactiques des batailles et celles plus politiques, plus stratégiques et donc plus globales des guerres.
La bataille décisive : entre mythe et réalité
Perspective historique
Force est de reconnaître que l’idée de la bataille décisive s’est surtout développée au cours de l’ère moderne et s’est affirmée plus particulièrement au XIXe siècle. C’est ainsi qu’en 1851, l’historien anglais Sir Edward Shepherd Creasy publia son œuvre principale intitulée The Fifteen Decisive Battles of the World: From Marathon to Waterloo (4). Il y décrit comment des guerres peuvent être réglées par une campagne rondement menée et s’achevant par une bataille décisive. D’autres ont poursuivi l’exercice jusqu’à notre ère contemporaine, intégrant toujours plus de batailles tel l’historien militaire américain, Paul K. Davis qui en a inventorié pas moins d’une centaine dans son livre intitulé 100 Decisive Battles: From Ancient Times to the Present (5) publié en 2001.
L’histoire des conflits armés montre que les formes de guerre ont évolué au fil des siècles, ne serait-ce que par l’influence des évolutions technologiques. Néanmoins, nous pouvons constater qu’a contrario de l’idée de la bataille décisive, la succession de sièges de l’antiquité au Moyen Âge a donné la part belle à la guerre d’usure et à l’attrition (6). Jusqu’au début de l’ère moderne, un siège était en effet généralement plus profitable qu’une victoire sur le champ de bataille. D’un côté, les gains escomptés d’un siège victorieux se mesuraient en surfaces de terres agricoles, de précieux butins et de nouvelles forteresses ; de l’autre, des armées moins sûres de leurs capacités préféraient s’engager dans un siège, quitte à l’interrompre pour le reprendre en des temps plus favorables (7). Dès lors, à l’exception de quelques batailles célèbres, l’affrontement rangé était de préférence évité, et plutôt de l’ordre d’escarmouches avec pour objectif d’intercepter les « chevauchées » adverses.
C’est donc progressivement, au cours des XVIIe et XVIIIe siècles, que les affrontements se sont déroulés sur des champs de bataille à proprement parler, sans pour autant obtenir de réelles « décisions » quant à l’issue des guerres. L’approche pouvait même être excessivement prudente à l’égard des batailles tel que le maréchal de Saxe a pu l’écrire : « Je ne suis point pour les batailles, surtout au commencement d’une guerre, et je suis persuadé qu’un habile général pourrait la faire toute sa vie sans s’y voir obligé. (8) »
In fine, la quête de « la bataille décisive permettant d’imposer sa volonté à l’ennemi » a pris son essor dans la première moitié du XIXe siècle, via le « paradigme napoléonien du succès » (9) tel que Jomini, puis Clausewitz, l’ont mis en avant. L’idée, reprise par Moltke, à la fin du XIXe siècle, s’appuie sur l’hypothèse que l’élimination de l’armée ennemie au cours d’une bataille d’ampleur, par les pertes infligées et les prisonniers capturés, permet de livrer l’état vaincu au vainqueur qui décide alors de la punition ou de l’humiliation qu’il souhaite infliger (10).
Confrontée à la réalité des conflits du XXe siècle, notamment à la durée et à l’envergure des opérations menées, l’idée de la bataille décisive a dû s’adapter. Face au changement d’échelles de temps et de lieu des combats, les batailles ont pris une dimension sans précédent. De la bataille d’Angleterre en 1940 à la bataille de Mossoul de 2016 à 2017, il n’y a effectivement rien de comparable avec Trafalgar ou Austerlitz en 1805. Pour autant, en leur accordant le nom de « bataille », un lien se crée, leur accordant la possibilité intrinsèque d’être « décisive » au même titre que les batailles napoléoniennes.
Désormais, au-delà de la perspective historique finalement assez récente de l’idée de bataille décisive, il s’agit surtout d’essayer d’en comprendre l’utilité. Si cette idée perdure, bien que l’historiographie contemporaine s’en soit éloignée et qu’aujourd’hui « l’histoire-bataille » a une connotation péjorative (11), il peut être utile d’en esquisser la raison.
Transmission d’un récit et fabrication du mythe
Les batailles dites « décisives » ont en commun de faire l’objet d’un récit qui, au fil d’interprétations successives, se transmet au cours de l’histoire. Le succès de l’œuvre de l’historien Georges Duby, Le dimanche de Bouvines (12), peut ainsi être analysé comme l’aboutissement d’un long processus mémoriel quant à l’emblématique bataille de Bouvines. La perception de cette bataille a d’ailleurs pu évoluer en fonction du message qui en est fait, de l’incarnation de la victoire du roi de France à celle de la France victorieuse. Les tableaux d’Horace Vernet et de Merry-Joseph Blondel qui ornent respectivement la galerie des batailles du château de Versailles et la salle du Conseil d’État au Louvre en attestent (13).
La représentation artistique tient de facto une place importante dans la construction du récit des batailles décisives, tout en acceptant une part de réinterprétation. Pour la transmission orale ou écrite, les canons de la tragédie sont à l’œuvre. Ils contribuent à en dessiner l’unité de temps, de lieu et d’action et permettent d’aboutir alors à une forme de catharsis au sens de la purgation des passions évoquée par Aristote dans sa Poétique. Les notions de « victoire » et de « défaite » font appel à l’émotion, à la passion qui influence la mémoire et l’interprétation des faits (14). De la chanson de geste jusqu’au théâtre puis au cinéma, les récits de batailles vont ainsi être centrés sur un point culminant, souvent déformé par rapport à la réalité, mais ils en accentuent le caractère « décisif ».
De plus, comme le précise la professeure Béatrice Heuser, nous pouvons observer « quatre grands types d’interprétation de la mythification des batailles » :
– le « fondement d’une légitimité [divine] de la dynastie du vainqueur » ;
– le « mythe originel […] de la conscience collective d’un groupe » ;
– l’agression subie par une armée défendant sa religion face à un autre culte ;
– et comme vecteur de mémoire pour « la réconciliation et la coopération entre anciens ennemis » (15).
Nous pouvons ainsi constater que la bataille de Bouvines, citée précédemment, intègre à elle seule plusieurs de ces types d’interprétations et ainsi, au-delà du caractère décisif qu’il pourrait lui être attribué, c’est surtout la caractérisation d’un mythe qui s’impose. In fine, la mythification prend le dessus sur l’aspect décisif de la bataille pour en faire perdurer la mémoire et servir de jalon dans la construction d’un récit national.
Les batailles décisives servent ainsi l’intérêt national dans leur dimension mythique et fondatrice : Bouvines (1214), Valmy (1792), Austerlitz (1805)… Néanmoins, bien qu’elles soient ancrées dans les esprits et dans les représentations collectives, les historiens contemporains peuvent en être aujourd’hui critiques. C’est notamment le cas avec la bataille de Poitiers en 732. Bien qu’elle fût recensée parmi les quinze batailles décisives d’Edward Shepherd Creasy au XIXe siècle et qu’elle fasse toujours partie intégrante de la culture « populaire » sinon d’un récit national, la plupart des historiens semblent désormais la considérer comme un engagement mineur (16).
Retenons que dans la transmission et la représentation de l’histoire des « batailles décisives », lorsqu’un processus de mythification est à l’œuvre et que cela s’inscrit dans une forme de récit national, l’aspect réellement « décisif » apparaît bien secondaire. Néanmoins, si cette caractérisation peut perdurer, ne devons-nous pas l’imputer à quelque chose de plus fondamental, qui tient à notre culture propre ?
Tropismes philosophiques de l’homme providentiel et de l’action décisive
Associé à l’idée de bataille décisive, telle la « pierre philosophale » capable de transformer une manœuvre en un anéantissement décisif au cours d’un engagement paroxystique, se trouve le « génie militaire » (17). Empreint d’idéalisme allemand voire d’une forme de romantisme, en plein essor au début du XIXe siècle, Clausewitz accordait ainsi une place prépondérante au « commandant en chef ». Sans prétendre à la paternité de l’idée, il en recherchait un sens plus profond (18). Fort notamment de son intuition face aux situations complexes rencontrées sur le champ de bataille, le « génie militaire » est ainsi capable de mener les actions nécessaires à la victoire décisive.
Nous sommes là de facto confrontés à la centralité de l’action propre à notre culture gréco-latine dont l’origine remonte aux philosophes hellénistiques. En effet, ici le commandant en chef, tel le héros grec, homme providentiel, personnage décisif par définition, se caractérise par ses exploits, actions décisives s’il en est. C’est ainsi que notre manière de penser est naturellement centrée sur l’action par opposition à la culture chinoise centrée sur le processus (19), pour laquelle « la guerre n’est pas perçue comme une activité héroïque » (20).
En effet, en attachant une plus grande importance aux processus, en tant que combinaison d’une multitude d’actions, l’approche chinoise met en avant la valeur des effets combinés d’actions entrelacées. Celles-ci engendrent une « transformation », qui « n’est pas locale, mais globale », « ne peut être momentanée, mais s’étend dans la durée » et « procède discrètement par influence, sur un mode ambiant, prégnant et pervasif » (21). Dès lors, il apparaît ici qu’en s’appuyant sur ces principes, la « bataille décisive » n’a plus sa place. Dépourvue de son sens, elle ne peut être considérée comme une fin en soi, ni même comme nécessaire pour être victorieux.
In fine, l’idée de la « bataille décisive » qui donne au « génie militaire » la capacité d’emporter la victoire, prend effectivement racine au plus profond de notre culture gréco-latine centrée sur l’action. Mis en regard d’une culture qui, elle, se concentre sur le principe de la « transformation », nous pouvons admettre que nous sommes effectivement ici confrontés à une forme de tropisme philosophique qui s’exprime sous la forme d’un biais culturel. Il s’agit à présent de comprendre les conséquences d’un tel biais sur notre pensée stratégique avant de pouvoir nous imaginer le transcender.
Face à une triple impasse stratégique
Les conflits du début du XXIe siècle (Afghanistan, Libye, Sahel, Levant) ont amené un certain nombre de commentateurs à questionner la notion de victoire et, par conséquent, l’idée de victoire décisive bien que le débat reste ouvert (22). Ainsi, le professeur américain William C. Martel a pu définir ce que devaient être les fondements d’une « pré-théorie » de la victoire qui repose sur quatre concepts dont les effets sont quantifiables : le niveau de la victoire (de la tactique à la grande stratégie), le changement de statu quo (de limité à global), la mobilisation pour la guerre (de limitée à étendue) et les responsabilités post-conflit (de limitées à prolongées) (23). Pour autant, l’historien militaire américain J. Boone Bartholomees reconnaît que si la victoire tactique voire opérationnelle s’appréhende et peut être quantifiée, la victoire stratégique est, quant à elle, un « problème plus compliqué » (24).
Comme le précise professeur de relations internationales, Colin S. Gray, pour qu’une victoire puisse être décisive il apparaît nécessaire que le vaincu l’accepte comme telle (25). Si tel n’est pas le cas, face à un adversaire qui refuse l’évidence, il s’avère alors que la recherche d’une bataille décisive nous conduit dans une triple impasse stratégique : impasse « d’échelle », impasse « statique » et impasse « apocalyptique », que nous pouvons ainsi confronter aux facteurs opérationnels : temps, espace, force.
Prisonnier des échelles de mesure (temps-espace)
Si nous admettons qu’une bataille puisse être considérée comme décisive en ce qu’elle provoque « une décision », il n’en demeure pas moins nécessaire d’en reconnaître la portée, dans le temps et dans l’espace. Bâtie sur le champ de bataille, l’illusion de la victoire décisive napoléonienne est ancrée dans une conceptualisation de la nature de la guerre comme celle d’un exercice tactique (26). Se pose alors la question du passage à l’échelle, de la portée stratégique voire politique d’une « bataille décisive ». En ce sens, Colin S. Gray fait la distinction entre la « victoire décisive » et le « succès stratégique ou l’avantage stratégique » (27). Il introduit ainsi différents niveaux sur une échelle de la réussite militaire.
Néanmoins, que la victoire soit tactique ou le succès stratégique, l’idée est bien que cela puisse s’inscrire dans le temps long et s’appliquer sur l’ensemble de l’espace considéré. Autrement dit, les effets de la « décision » se mesurent à l’aune de leur durée et de l’étendue géographique des territoires concernés. Le problème ici est qu’une bataille ne peut être « décisive » que pour un temps donné et sur un espace défini, aussi grands soient-ils. Elle ne peut l’être ni ad vitam aeternam, ni urbi et orbi.
Comme le précise par ailleurs Béatrice Heuser, la trinité « victoire, paix, justice » est malheureusement absente du « paradigme napoléonien » ce qui ne peut que limiter dans le temps l’impact d’une bataille dite décisive (28) ; voire, celle-ci ne procèdera qu’à se répéter après un temps plus ou moins long et en divers lieu, plus ou moins proches. L’idée de bataille décisive nous mène alors dans une impasse stratégique, prisonniers de l’échelle de temps et d’espace qui en mesure le succès, nous sommes condamnés à en réitérer l’expérience au-delà de cette même échelle de temps et d’espace.
La dynamique impensée (espace/temps)
Au cœur de la doctrine interarmées de planification stratégique, déclinée ensuite en termes de planification opérationnelle, nous pouvons trouver l’idée centrale qui est d’atteindre un état final recherché (EFR). Cette idée que nous partageons avec l’ensemble de nos alliés, notamment au sein de l’Otan, se définit comme « la situation finale qui matérialisera le succès de l’engagement » (29). Rapporté à l’idée de la bataille décisive, cela signifierait que l’EFR puisse être atteint en remportant ladite bataille. Ceci aurait pour conséquence de parachever l’ensemble des opérations planifiées, préparées puis conduites conformément aux lignes d’opérations définies à l’étape de la conception opérationnelle.
Néanmoins, le concept d’EFR étant par nature « final », il ne laisse pas de place à ce qui suivra. D’une certaine manière, il fait abstraction des conséquences ultérieures de la situation qui matérialise le succès de l’engagement. Nous voici donc confrontés à une vision statique de la victoire, alors que celle-ci ne peut être que dynamique. En effet, le temps ne s’arrête pas de tourner et les situations ne cessent d’évoluer.
De plus, comme nous l’enseigne l’historien Basil H. Liddell Hart, « si vous consacrez la totalité de vos efforts exclusivement à la recherche de la victoire et sans penser aux conséquences ultérieures, vous pouvez être trop épuisé pour tirer parti de la paix, et il est presque certain que cette paix sera une mauvaise paix portant déjà les germes d’un autre conflit » (30). Ainsi, en ne concevant pas la nature dynamique des situations sur lesquelles nous agissons, nous creusons le sillon qui nous mènera à de nouvelles batailles et invalidera, de facto, l’idée de « bataille décisive », comme celle de l’atteinte d’un état qui puisse être réellement « final ».
L’escalade apocalyptique (force)
De manière objective, dans la dialectique offensive-défensive à l’œuvre pour la définition d’options stratégiques, l’idée de bataille décisive tient son rang pour l’une comme pour l’autre. En effet, comme l’explique l’historien Hervé Coutau-Bégarie, « l’offensive et la défensive ne sont pas opposées au point d’entraîner une inversion des principes » (31). Pour autant, l’idée avait tout de même une place prépondérante dans la doctrine « d’offensive à outrance » prônée par le maréchal Foch dans les années précédant la Première Guerre mondiale. Sa pensée, encore plus que celle de Moltke, était imprégnée par la quête d’une victoire décisive qui devait être remportée au cours d’une grande bataille (32). Malheureusement, au-delà de l’escalade initiale des premiers mois du conflit, la situation d’égalité et la guerre des tranchées qui s’est prolongée pendant quatre années, « dans un tel carnage », n’avaient pas été anticipées (33). Nous ne pouvons là que déplorer une fuite en avant vers une situation apocalyptique, nouvelle impasse stratégique conséquence de volonté de vaincre par le biais d’une bataille décisive.
Ensuite, à partir de la fin de la Seconde Guerre mondiale, à l’ère de l’arme atomique, les conséquences d’une éventuelle escalade nucléaire sont telles que Casper Weinberger, secrétaire à la Défense de Ronald Reagan, répétait comme un « sage mantra, qu’une guerre nucléaire ne peut être gagnée et ne devrait jamais être menée » (34). Colin S. Gray déplorait même l’absence de « théorie de la victoire » à la fin des années 1970 aux États-Unis comme en Europe au sein de l’Otan. Selon lui, eu égard au concept de « destruction mutuelle garantie », il n’était même pas envisagé de vaincre l’URSS. D’une certaine manière, l’idée de la « bataille nucléaire » était tellement « décisive » qu’elle ne permettait plus de penser la victoire « stratégiquement », y compris en cas de conflit « sous le seuil de la dissuasion » (35).
In fine, la perspective d’une escalade apocalyptique rend stérile l’idée de la bataille décisive, que ce fut via la puissance de feu conventionnelle au début du XXe siècle, ou que ce soit par la destruction mutuelle consécutive à l’emploi de l’armement nucléaire. La « force » en jeu est telle que la bataille décisive n’est plus concevable, voire trop concevable, et nous mène à nouveau dans une impasse stratégique.
Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme
À première vue, les impasses engendrées par la quête d’une bataille qui déciderait du sort de la guerre peuvent questionner l’idée même de victoire. Pour autant, comme le rappelle le professeur Olivier Zajec, si effectivement le succès stratégique et la réussite politique ne peuvent être garantis par une victoire tactique, il ne s’agit pas non plus de démonétiser l’idée de « victoire militaire » qui constitue bien la base de la « pyramide stratégique » (36). Simplement, pour réellement transcender l’idée de la « bataille décisive » nous devons nous concentrer sur certains aspects déterminants de la dimension politique des conflits armés, qui peuvent ainsi être compris comme des transformations de rapports de force, au sens de la pensée chinoise et tel que décrit précédemment.
En effet, il apparaît à ce jour nécessaire de prendre en compte l’idée de « propension » pour mieux comprendre et exploiter les situations dans lesquelles les conflits interviennent. Par ailleurs, si la notion de forces morales a récemment fait l’objet d’une grande attention, elle l’a surtout été dans une dimension combattante, voire de résilience limitée aux conflits armés, alors que la dimension du temps long reste incontournable, par-delà les « points de rupture » incarnés par l’idée de « batailles décisives ». Enfin, nous en revenons au fait que la puissance militaire, qu’elle soit « matérielle » ou « immatérielle » s’exprime avant tout dans une grammaire politique, mère de toutes les batailles.
Intégrer la « propension » des situations, comprendre la « transformation »
Dans son Traité de l’efficacité (37), le philosophe français François Jullien décrit la notion de « propension », caractéristique de la culture philosophique chinoise qui, contrairement à la philosophie hellénistique, ne cherchait pas à créer de modèles qui pouvaient servir ensuite comme des « faisceaux de normes ». Elle offre ainsi une perspective qui mérite que nous nous y attardions.
En effet, la pensée chinoise préfère se concentrer sur le déroulement des choses. En procédant de la sorte, l’idée fondamentale est d’intégrer la « propension » des situations (i.e. leur évolution naturelle) à notre schéma de pensée pour être en mesure de saisir tout le « potentiel » de ces mêmes situations (38). Le « potentiel » s’entend comme la capacité « latente » de la situation à évoluer, que ce soit en notre faveur, ou à l’inverse en faveur de nos adversaires. De cette manière, l’appréhension des situations se veut holistique et non analytique. S’il ne s’agit pas d’opposer les deux approches, bien au contraire, l’approche holistique permet surtout de mieux comprendre les interrelations entre les événements quand l’approche analytique permet de mettre en avant les liens de cause à effet, s’ils existent.
Ainsi, avec une vision plus proche de la pensée chinoise, qui se concentre sur le « processus en développement » (39), il s’agit de prendre en compte l’idée que nous faisons systématiquement face à une situation qui se « transforme ». Ceci nous permet d’y intégrer naturellement le facteur temps. En effet, cette transformation se traduit par une évolution du « potentiel » des situations, ce qui permet d’en révéler la « propension ». Autrement dit, en nous attachant à bien décrire les potentialités d’une situation nous pouvons en comprendre quelles en sont les évolutions naturelles, et c’est ainsi que nous pouvons intégrer la « propension » dans notre analyse stratégique. Nous percevons alors que le facteur temps génère un processus de « maturation » de la situation qui est lui-même source d’effets et qui s’exprime alors sous forme « d’occasions » (40) qu’il faut ensuite pouvoir saisir.
De plus, en prenant en compte l’impact du facteur temps vis-à-vis de la réalisation de « processus », le caractère « décisif » n’est plus issu d’une action ou d’une « bataille » spécifique mais bien d’une capacité à saisir les « occasions » lorsqu’elles se présentent. En effet, du point de vue de la pensée chinoise, les « occasions » ne sont pas générées délibérément par des « actions », qu’elles soient « héroïques » ou non, mais plutôt comme des « émergences », manifestations visibles et spontanées issues d’une transformation continue (41).
Ainsi, la bataille s’inscrit dans un système de forces en évolution qu’il convient d’envisager comme une situation en pleine « transformation ». L’intelligence stratégique s’exprime dans la capacité à exploiter le potentiel des situations et à saisir les occasions qui émergent. En sachant intégrer la « propension » des situations dans l’atteinte des objectifs de la guerre, cela permet notamment d’anticiper les effets des affrontements vis-à-vis de la « transformation » à laquelle ils contribuent. Si la « propension » est défavorable, il devient absolument nécessaire de détecter les facteurs sur lesquels s’appuyer pour ne pas être défaits. Cette approche de la guerre apparaît bien plus politique dans son état d’esprit et sans renier nos propres fondements philosophiques hellénistiques dont est issu notre attachement aux modèles théoriques, elle offre, in fine, la possibilité de mieux appréhender la « tectonique » des conflits.
Forces morales du temps long, forces de « transformation »
Sans revenir sur l’importance capitale du facteur humain dans la conduite de la guerre, il s’agit d’en comprendre les ressorts psychologiques qui permettent de prendre le dessus sur nos adversaires. Si nous considérons que « vainqueur ou vaincu, on s’épuise à peu près également » (42), nous pouvons estimer que finalement la différence peut être minime à la faveur de ceux qui l’emportent.
Lorsqu’au XIXe siècle, le colonel Charles Ardant du Picq, théoricien militaire, écrit que « dans le combat, deux actions morales, plutôt que deux forces matérielles, sont en présence ; la plus forte l’emporte » (43), tout en intégrant l’impact de la technologie moderne sur le combat, il suggère malgré tout l’idée d’un point de rupture psychologique : « l’homme n’est capable que d’une quantité donnée de terreur » (44). Bien que ce point de rupture s’inscrive dans le domaine des forces morales, nous retrouvons ici la même idée de « bataille décisive » censée faire indéniablement basculer la guerre.
Pour autant, la première manifestation de la force morale n’est-elle pas de refuser la défaite ? Au-delà de l’issue, que d’aucuns auraient pu penser fatale, de la bataille de France, le général de Gaulle a incarné la « France libre » puis la « France combattante ». Alors certes en faisant « l’examen de conscience des Français », Marc Bloch a dépeint la « France de la défaite » face à sa « faiblesse collective », son effondrement moral (45). Pour autant, à peine cinq ans plus tard, parce que certains ont pu et ont su trouver les forces morales pour continuer le combat, la France sort de la Seconde Guerre mondiale du côté des vainqueurs et porte en elle les ferments des Trente glorieuses qui vont suivre.
Cette force morale qui permet de dire « non », de refuser la défaite, tient de la force de caractère, l’un des piliers du concept de virtù mis en avant par Machiavel au début du XVIe siècle. La virtù de Machiavel, quelque peu différente de l’idée des vertus cardinales introduites par Aristote (Prudence, Courage, Tempérance et Justice) mais sans les renier complètement, s’appuie sur les « forces » et les « compétences », de manière à saisir la « fortune » mais aussi surtout à ne pas succomber à « l’infortune » (46). Ainsi, c’est grâce aux forces morales qu’il devient possible d’exploiter notre compréhension de la « propension » des situations et des « transformations » à l’œuvre évoquées précédemment.
Il s’agit donc surtout d’entretenir les forces immatérielles, non pour être en mesure de jeter toutes les forces matérielles dans une bataille décisive, mais bien pour s’inscrire dans la durée, dans la « succession de batailles » qui peuvent se présenter indéfiniment, pour que l’objectif puisse être atteint et maintenu, sans nécessairement de limite dans le temps et potentiellement bien au-delà du champ de bataille voire du théâtre d’opérations. Plus que vaincre, il faut convaincre, la « vraie gloire » selon Victor Hugo (47). Nous devons être moralement armés pour faire face à une « transformation » perpétuelle et ne pas céder ni aux chants des sirènes de la « bataille décisive », ni aux chantres des prétendues « guerres éclairs ».
Affirmer la puissance politique, le tempo de la « transformation »
Pour ne subir l’évolution de la conflictualité, ou appréhender « la guerre comme définitivement injustifiable, impensable, inutilisable et indiscernable » et la rendre « immaîtrisable », le général Benoît Durieux propose une déclinaison de la « formule » clausewitzienne qui entend la guerre comme une « négociation militaire ». Les parties prenantes s’affrontent sur des espaces physiques dans « une dialectique de la présence et de la violence mise en scène devant une audience » (48). Ainsi, l’espace de l’affrontement « représente une sorte de matrice de transfert car il est à la fois un objectif militaire et un enjeu politique pour l’épreuve de force » (49). Ici, loin de l’idée de la bataille décisive, l’action militaire s’intègre sous la férule politique comme une étape de la « transformation », notamment dans un cadre où désormais cette action n’est pas nécessairement aussi « polarisée » que nous l’imaginons et que les « audiences » ne sont pas uniquement celles que constituent les peuples belligérants (50).
De plus, transcender l’idée de bataille décisive ne signifie pas pour autant que les batailles n’ont plus de sens, et que la victoire militaire n’a pas de valeur. Bien au contraire, comme Olivier Zajec s’attache à le démontrer, nous devons bien comprendre la « complémentarité de sens et d’action entre les sphères tactiques, stratégiques et politiques », en ce qu’elles partagent « la même grammaire » (51). La stratégie peut être alors perçue comme un dialogue entre les « désirs politiques » et ce qui est réalisable concrètement sur le terrain (52). Il est alors nécessaire de comprendre comment l’ensemble s’articule, comment percevoir le conflit armé comme « une modalité singulière et tragique de l’échange politique » (53).
L’enjeu est de ne pas céder à la « tendance permanente à la dépolitisation des conflits », au profit d’un idéalisme moral ou d’un libéralisme débridé, et ne pas perdre de vue l’adversaire selon les principes d’un « réalisme interactionnel » (54). Celui-ci redonne toute sa place à l’État souverain, porteur de la « dignité » des peuples que nous aurions tort de négliger au risque de perdre de vue les racines profondes et les dynamiques des conflits armés que nous avons intégrées dans l’idée de la « propension ». L’État en tant que représentant des peuples est ainsi légitime pour défendre leurs intérêts. Par ailleurs, comme le philosophe Raymond Aron a pu l’écrire, « plus les chefs d’États calculent en termes de coûts et de profits [et plus ils] renoncent à l’ivresse de triomphes éclatants » (55) et donc aux batailles décisives.
C’est ainsi que la « fonction politique de la guerre » peut s’exprimer dans le concept de la puissance qui elle-même contrôle la force déployée pour ainsi limiter la violence de l’engagement (56). En s’affirmant de la sorte, la puissance politique est en mesure d’anticiper les « transformations » à l’œuvre, pour que « la victoire, au vrai sens du terme, implique que l’état de paix, pour le peuple vainqueur, est meilleur après la guerre qu’auparavant » (57). Cela lui permet également de dicter le tempo des transformations, de composer avec les options stratégiques et les facteurs opérationnels de manière à en éviter les impasses, de comprendre comment mettre en œuvre les processus nécessaires pour accompagner ou contrer la propension des choses et s’assurer que les forces morales répondent à l’appel.
Conclusion : maîtriser la « tension décisive »
Bien que nous soyons en mesure de comprendre l’origine et les limites de l’idée de bataille décisive, entre mythe et réalité, au cœur des guerres révolutionnaires et de la définition des identités nationales, il faut également admettre que cette idée a encore un impact sur notre façon de penser la guerre, ne serait-ce que dans notre culture populaire. Ancrée au plus profond de notre culture philosophique hellénistique et dans une forme de récit national peuplé de légendes héroïques, elle se prête parfaitement à la « scénarisation » de l’histoire militaire. Pour autant, il reste absolument nécessaire de s’en affranchir. Nous le devons au regard des impasses stratégiques dans lesquelles cette idée nous amène de gré ou de force.
En effet, les limites que nous fixons à nos échelles de temps et d’espace dans l’étude des conflits armés, ne doivent pas être un biais pour nos analyses stratégiques. De même, nous ne pouvons pas nous affranchir de penser nos stratégies au-delà d’un effet final recherché qui ne sera très certainement pas si final que cela. De fait, après les conflits mondiaux du XXe siècle et en comprenant les tenants et les aboutissants de la grammaire nucléaire, la bataille réellement décisive ne saurait nous mener qu’à l’apocalypse.
C’est donc en transcendant l’idée de bataille décisive, que nous pouvons alors comprendre que « tout est politique ». La notion de « propension » doit ainsi être analysée en ce sens, dans ce qu’elle nous dit de l’évolution naturelle des rapports de force, du « potentiel » qu’il sera possible d’exploiter. Les forces morales constituent le terreau fertile et politique des acteurs de la « transformation », elles leur en donnent la force. Elles font partie des qualités attendues des hommes et femmes d’État qui peuvent alors mesurer l’exigence de la puissance, en ce qu’elle contrôle ce qui est à l’œuvre au cœur de la « transformation » de rapports de force ; et en ce qu’elle constitue « la capacité d’une unité politique d’imposer sa volonté aux autres unités » (58).
Ainsi, l’articulation de l’idée de « transformation » des rapports de force s’appuie sur l’appréhension de la « propension » de la situation et des forces morales qui la sous-tendent. La puissance politique en détermine et en contrôle la force de l’engagement armé, tout en y intégrant le bon tempo. Il s’en dégage l’idée d’une tension qui s’établira ainsi dans les rapports de force. Tout l’enjeu sera de maîtriser cette tension pour être réellement décisif. ♦
(1) Affiche « À tous les Français », Londres, juillet 1940.
(2) Appel du 18 juin 1940.
(3) Allocution devant la 4e session nationale de l’IHEDN, 18 septembre 2024.
(4) Creasy Edward Shepherd, The Fifteen Decisive Battles of the World: From Marathon to Waterloo (1851), Dover Publications, rééd. 2008, 400 pages.
(5) Davis Paul K., 100 Decisive Battles: From Ancient Times to the Present, Oxford University Press, 2001, 480 pages.
(6) Harari Yuval Noah, « The Concept of “Decisive Battles” in World History », Journal of World History, vol. 18, n° 3, University of Hawaï Press, 2007, p. 251-266.
(7) Nolan Cathal L., The Allure of Battle. A History of How Wars Have Been Won and Lost, Oxford University Press, 2017, p. 30.
(8) Saxe (de) Maurice, Rêveries sur l’art de la guerre (1756), Economica, rééd. 2002, p. 223.
(9) Heuser Beatrice, Penser la stratégie, de l’antiquité à nos jours, Picard, 2010, p. 349.
(10) Freedman Lawrence, The Future of War. A History, Penguin Books, 2017, p. 8.
(11) Henninger Laurent, La nouvelle histoire-bataille, Espaces Temps, 1999.
(12) Duby Georges, Le dimanche de Bouvines, Gallimard, 1973, rééd. 1985, 364 pages.
(13) Oschema Klaus, « Bouvines 1214, De la construction d’un mythe national à l’événement européen », in Davion Isabelle et Heuser Beatrice (dir.), Batailles. Une histoire des grands mythes nationaux, Belin, 2020.
(14) Nolan Cathal L., op. cit., p. 2.
(15) Heuser Béatrice, « Comment une bataille devient-elle mythique ? », Res Militaris, vol. 11, n° 1, 2021.
(16) Nolan Cathal L., op. cit., p. 30.
(17) Nolan Cathal L., op. cit., p. 12.
(18) Heuser Beatrice, Reading Clausewitz, Pimlico, 2002, p. 72.
(19) Jullien François, Traité de l’efficacité, Grasset, 1996, p. 77.
(20) Coutau-Bégarie Hervé, Traité de stratégie, Economica, 2008, p. 457.
(21) Jullien François, Conférence sur l’efficacité, Presses Universitaires de France, 2005, p. 56.
(22) Gray Colin S, Defining and achieving decisive victory, US Army War College Press, 2002, 53 pages p. 1 (https://press.armywarcollege.edu/cgi/viewcontent.cgi?article=1822&context=monographs).
(23) Martel William C., Victory in War, Foundations of Modern Military Policy, Cambridge University Press, 2007, p. 94.
(24) Bartholomees J. Boone, « Theory of Victory », Parameters, The US Army War College Qarterly, vol. 38, n° 2, 2008, p. 27 (https://press.armywarcollege.edu/cgi/viewcontent.cgi?article=2419&context=parameters).
(25) Gray Colin S., op. cit., p. 17.
(26) Crowell Lorenzo M, « The illusion of the decisive Napoleonic victory », Defense & Security Analysis, vol. 4, n° 4, 1988, p. 329.
(27) Gray Colin S., op. cit., p. 10.
(28) Heuser Beatrice, « Victory, Peace, and Justice. The Neglected Trinity », Joint Forces Quaterly, n° 69, 2013, p. 6-12.
(29) Doctrine interarmées DIA-5(C)_A&PS(2019), n° 8/ARM/CICDE/NP du 9 janvier 2020, p. 53.
(30) Liddell Hart Basil H., Stratégie, Perrin, 2015, p. 559.
(31) Coutau-Bégarie Hervé, op. cit., p. 401.
(32) Heuser Beatrice, Reading Clausewitz, Pimlico, 2002, p. 99.
(33) Freedman Lawrence, op. cit., p. 14.
(34) Gray Colin S., op. cit., p. 3.
(35) Gray Colin S., « Nuclear Strategy: The Case for a Theory of Victory », International Security, The MIT Press, vol. 4, n° 1, 1979, p. 54-87.
(36) Zajec Olivier, « De la victoire tactique au succès stratégique, ruptures et continuité d’une relation paradoxale », in Fouillet Thibault (dir.), La Guerre au XXIe siècle. Le retour de la bataille, Éditions du Rocher, 2023, p. 19-36.
(37) Jullien François, Traité de l’efficacité, Grasset, 1997, 240 pages.
(38) Ibidem, p. 32.
(39) Cheng Anne, Histoire de la pensée chinoise, Seuil, 2002.
(40) Jullien François, op. cit., p. 87.
(41) Ibidem, p. 83-107.
(42) Guibert Jacques, Essai général de tactique (1772), Economica, 2004, p. 741.
(43) Ardant du Picq Charles, Études sur le combat. Combat antique et combat moderne (1880), Economica, rééd. 2004, 252 pages, p. 102.
(44) Ibidem, p. 94.
(45) Bloch Marc, L’étrange défaite, Gallimard (1946), rééd. 1990, p. 165.
(46) Heuser Beatrice, « Fortuna, chance, risk and opportunity in strategy from Antiquity to the Nuclear Age », Journal of Strategic Studies, vol. 46, n° 6-7, 2023, p. 1406-1433 (https://doi.org/10.1080/01402390.2022.2111306).
(47) « Rien n’est stupide comme vaincre ; la vraie gloire est convaincre », Les Misérables, 1862.
(48) Durieux Benoît, « Quel sens pour l’action militaire un siècle après 1917 ? », Inflexions, 2017/3 n° 36, 2017, p. 85-97 (https://inflexions.net/la-revue/36/dossier/quel-sens-pour-laction-militaire-un-siecle-apres-1917).
(49) Ibidem.
(50) Simpson Emile, War from the Ground Up, Twenty-First-Century Combat as Politics, Hurst & Company, 2007, p. 228.
(51) Zajec Olivier, op. cit., p. 33.
(52) Simpson Emile, op. cit., p. 14.
(53) Zajec Olivier, Les limites de la guerre. L’approche réaliste des conflits armés au XXIe siècle, Mare & Martin, 2024, 466 pages, p. 32.
(54) Ibid, p. 376.
(55) Aron Raymond, Paix et guerre entre les nations (1962), Calmann-Lévy, rééd. 2005, 832 pages, p. 57.
(56) Zajec Olivier, op. cit., p. 390.
(57) Liddell Hart Basil H., op. cit., p. 565.
(58) Aron Raymond, op. cit., p. 58.









