Dans son premier numéro daté de mai 1939, le Comité de direction de la revue Défense Nationale précise que « son but est d’attirer l’attention sur les grands problèmes qui, à des titres divers, intéressent la Défense nationale et qui sollicitent le concours de toutes les activités…La revue compte le faire en portant ses regards vers l’avenir, dans une atmosphère de large indépendance, de pensée renouvelée et de haute sérénité d’esprit ». Lire la suite

  p. 5-6
  p. 7-15

Bien que lente, l’évolution des armées s’est manifestée partout : dans le domaine opérationnel, les interventions réelles se sont faites plus fréquentes et plus lourdes ; sur le terrain, le responsable, jusqu’à un faible niveau hiérarchique, est intégré dans la boucle décisionnelle et reçoit plus que sa part du risque politique et pénal encouru. Par ailleurs, la place des militaires s’est réduite dans la société française, le paradigme militaire se fait même moins visible ; l’industrie d’armement est devenue duale, la notion de dualité étant parfois mal interprétée. Dans cette évolution qui fait trembler leurs assises, quels mythes refondateurs proposer de nouveau aux armées ?

  p. 16-30

Organisé par l’IHEDN, avec la collaboration de Futuribles, le colloque du 13 octobre 2000 sur les « Perspectives et conditions de la sécurité à l’horizon 2025 » faisait le tour des différents aspects de l’actualité géopolitique, institutionnelle, sociologique, stratégique et militaire. L’objectif était de présenter, au-delà des tendances prévisibles, les ruptures envisageables, et d’offrir une analyse approfondie de différents scénarios du futur à moyen terme ; bref une réflexion prospective aussi complète que possible. Nous proposons la synthèse des interventions qui nous ont paru les plus marquantes.

  p. 31-44

Entre la politique de défense et l’action militaire, se trouve la stratégie, qui se situe au niveau des grands principes de l’action. Au-delà des positions adoptées sur les multiples et complexes affaires stratégiques, existe-t-il en France aujourd’hui une ligne directrice stratégique ? Autrement dit, les actions de nature stratégique dans laquelle la France est engagée obéissent-elles à une vision d’ensemble qui garantit leur cohérence ? Des problèmes difficiles, complexes et nouveaux se posent dans la situation géopolitique actuelle. Ils commanderaient un véritable débat stratégique débouchant sur une stratégie claire. Militaires et diplomates sont complémentaires et ont un rôle majeur à jouer pour atteindre cet objectif. Au-delà de la convergence des idées, ils doivent être capables d’une communauté de pensée. Nous en sommes encore très loin.

  p. 45-55

La guerre a subi progressivement une réduction de son fondement juridique. Devenu en 1945 illicite par principe, l’affrontement armé entre États obéit à des règles tendant à limiter le recours et l’usage de la force par les mécanismes de sécurité collective prévus par les organisations internationales. Loin d’avoir disparu, à l’entrée dans le XXIe siècle, la guerre peut aussi être contrée par l’ingérence humanitaire dans les conflits internes et la justice internationale pour juger les crimes de guerre ou contre l’humanité. Porteurs de tous les espoirs de la mondialisation, le droit international demeure le facteur principal d’une organisation sociale assurant la coexistence entre les États et la satisfaction des intérêts communs de l’humanité.

  p. 56-65

Devant la perte des valeurs traditionnelles à laquelle la société civile est confrontée, le citoyen ne trouve plus ses repères et assiste au triomphe de l’égoïsme et du chômage, constate la crise de l’autorité et le développement de l’assistanat, quand il n’est pas victime des perversions du progrès scientifique. Le militaire en est plus ou moins préservé. Il est toutefois soucieux des conséquences de la multiplication des opérations extérieures et de la professionnalisation sur le fonctionnement courant de son unité. Lire les premières lignes

  p. 66-75

Étude, par un homme du Sud, sur l’évolution de la sécurité et du partenariat en Méditerranée, dans les dix dernières années. Après avoir brièvement rappelé les diverses initiatives régionales et sous-régionales, le paysage géopolitique est tracé. L’auteur analyse en profondeur les stratégies de l’Union européenne et des États-Unis, ainsi que les réponses des partenaires arabo-méditerranéens, en rappelant avec force le caractère central de la question palestinienne. Il tente, en conclusion, une ébauche du partenariat de demain entre l’Europe et les pays du Sud, pour qu’enfin la Méditerranée entre dans « une ère de concorde, de respect et de fraternité ».

  p. 76-94

Le changement d’Administration aux États-Unis est le moment propice pour faire le point de la stratégie militaire américaine en Afrique sub-saharienne et pour réfléchir à ses évolutions possibles. L’Administration Clinton a multiplié les initiatives pour développer une politique africaine caractérisée par trois intérêts fondamentaux : l’accès à des ressources et le développement de routes commerciales, la protection contre les menaces transnationales, des préoccupations d’ordre humanitaire indissociables des questions de politique intérieure. Lire la suite

  p. 95-110

L’Afrique, elle aussi, subit le contrecoup de l’effondrement de l’URSS : de nouvelles conditions géopolitiques se dessinent depuis une dizaine d’années, en même temps qu’apparaissent de nouveaux critères de puissance. L’application de ces derniers au cas du Nigeria montre qu’il n’a pas acquis tous les attributs d’une puissance régionale.

  p. 111-124

Deux ans et demi après avoir remporté l’élection présidentielle en faisant campagne sur le thème du changement et d’un retour à la paix civile, le chef de l’État colombien, Andrès Pastrana Arango a élaboré un programme global en faveur de la paix et du développement socio-économique de la Colombie.

  p. 125-138
  p. 139-144

Chroniques

  p. 145-154
  p. 155-157
  p. 158-164
  p. 165-170
  p. 171-174
  p. 175-177
  p. 178-180
  p. 181-184

Bibliographie

Kang Cho-hwan et Pierre Rigoulot : Les aquariums de Pyongyang. Dix ans au goulag nord-coréen  ; Robert Laffont, 2000 ; 240 pages. - Eugène Berg

Au lendemain des premières retrouvailles, en août 2000, entre familles coréennes après un demi-siècle de silence et au moment où, pour la première fois, un haut dignitaire nord-coréen rendait visite au président Clinton à la Maison-Blanche, il est intéressant de lire ce poignant témoignage d’un ancien rescapé du goulag nord-coréen. Kang Cho-hwan, originaire d’une riche famille de Coréens revenus du Japon pour « aider à la reconstruction de la patrie », a été interné au milieu des siens dès l’âge de neuf ans pendant près d’une décennie. Le camp d’internement de Yodok situé dans une zone montagneuse presque inaccessible est délimité par des barbelés sur les crêtes. Lire la suite

  p. 185-185

Jean-Louis Thuille : Cher porte-avions  ; Éditions Jean-Michel Bordessoules, 2001 ; 222 pages - Roger Vercken

Bien qu’il soit rédigé sous une forme volontairement impersonnelle et tant soit peu romancée, ce livre du capitaine de vaisseau Jean-Louis Thuille relate en vérité les souvenirs les plus marquants des quelque vingt premières années de sa carrière d’officier de marine, principalement celles qu’il a vécues à bord de nos porte-avions. Lire la suite

  p. 185-186

Gabriel de Broglie : Mac Mahon  ; Perrin, 2000 ; 459 pages - Pierre Morisot

Fin connaisseur de l’histoire du XIXe siècle, Gabriel de Broglie, tout en appartenant à l’illustre famille, ne fait pas partie de la branche du duc Albert, tenant de l’« ordre moral », présent à toutes les pages de la seconde partie de l’ouvrage. Cette référence permet de rappeler que Mac Mahon, militaire illustre jusqu’à soixante-cinq ans, fut ensuite le premier président de ce qui devint la IIIe République par la grâce de la « consécration discrète » due à l’amendement Wallon. Cette face du personnage est sans doute, par-delà l’anecdote et la réputation acquise sur les champs de bataille, la plus importante pour le passé de notre pays ; elle est en effet associée — nous a dit personnellement l’auteur — à la dernière occasion d’instaurer en France un régime de type orléaniste (« une république sans les républicains… évitant la dérive révolutionnaire des expériences précédentes ») et à l’adoption de celui qui, malgré bien des péripéties et une succession de numéros, est resté le nôtre jusqu’à ce jour. Lire la suite

  p. 186-187

Elizabeth Sieca-Kozlowsi et Alexandre Toumarkine : Géopolitique de la mer Noire. Turquie et pays de l'ex-URSS  ; Karthala, 2000 ; 222 pages - Eugène Berg

L’espace régional de la mer Noire, perçu ici uniquement dans sa façade orientale (hors Grèce et Balkans) et n’impliquant donc que la Turquie et les pays de l’ex-URSS, a pris consistance et cohérence surtout à partir de la création, en juin 1992, de la zone de coopération de la mer Noire, sorte d’organisation régionale assez peu structurée vouée à la promotion des échanges régionaux. Pourtant, c’est à un niveau inférieur, infraétatique, que les dynamiques régionales sont apparues les plus actives. Les nouveaux flux, commerciaux, humains, pour ne rien dire des trafics ont été rarement le fait des États de la région, qui ont plutôt donné le sentiment de suivre ce mouvement ; avant de commencer à chercher à le contrôler, voire à s’y substituer. Lire la suite

  p. 187-188

Un forum consacré aux Balkans et aux enseignements à tirer des événements qui ont conduit à l’occupation du Kosovo par les forces de l’Otan s’est déroulé au Sénat le 29 novembre 1999 sous la présidence de M. Alain Bournazel président d’Action pour une Confédération paneuropéenne. Vingt personnalités y ont pris la parole : le sénateur Bernard Seillier, l’ambassadeur Pierre Maillard, les généraux Pierre-Marie Gallois, Éric de La Maisonneuve, Claude Le Borgne et Henri Paris, les universitaires Jean-Paul Bled, Roberto de Mattei et Christophe Réveillard, les journalistes Éric Branca, Jean-Christophe Buisson, Kosta Christitch et Louis Dalmas, les écrivains Vladimir Volkoff, Komnen Becirovic et Roland Hureaux et les spécialistes de géopolitique Christian Méric (colonel e.r.), Aymeric Chauprade et Alexandre Del Valle. Lire la suite

  p. 188-189

Alexandre Del Valle : Guerres contre l'Europe, Bosnie-Kosovo-Tchétchénie...  ; Éditions des Syrtes, 2000 ; 430 pages - Claude Le Borgne

Alexandre Del Valle ne veut pas qu’on l’accuse d’antiaméricanisme primaire. La précaution est utile car la thèse est claire : l’Amérique est en guerre, et contre l’Europe. Dans cette guerre, l’islam est son allié ; où l’on retrouve son premier livre, Islamisme et États-Unis, une alliance contre l’Europe (1)Lire la suite

  p. 189-190

Revue Défense Nationale - Janvier 2001 - n° 627

Revue Défense Nationale - Janvier 2001 - n° 627

Dans son premier numéro daté de mai 1939, le Comité de direction de la revue Défense Nationale précise que « son but est d’attirer l’attention sur les grands problèmes qui, à des titres divers, intéressent la Défense nationale et qui sollicitent le concours de toutes les activités…La revue compte le faire en portant ses regards vers l’avenir, dans une atmosphère de large indépendance, de pensée renouvelée et de haute sérénité d’esprit ».

À l’aube du troisième millénaire ces propos restent d’une brûlante actualité, d’autant que ceux qui diagnostiquaient « la fin de l’Histoire » à l’issue de l’implosion de l’empire soviétique se sont lourdement trompés.

La présence d’une seule puissance dominante, dont la stratégie, largement diffusée, est étroitement subordonnée au progrès technologique et au concept de « révolution dans les affaires militaires », occulte, voire obscurcit, toute réflexion indépendante.

Il serait injuste de considérer les États-Unis seuls coupables de cet état de fait. L’Europe en général, et la France en particulier, en sont largement responsables. Depuis une quarantaine d’années toute véritable réflexion stratégique a disparu dans notre pays. On ne peut tenir pour telle les explications accompagnant les changements qui ont fait suite aux évolutions géopolitiques de la dernière décennie et qui résultent en fait de contraintes financières et de décisions politiques opportunistes et discrétionnaires. De gros efforts ont été faits pour présenter comme cohérent, ce qui s’apparente plus à une stratégie de « nains de jardin » et de petits moyens qu’à une réflexion générale à laquelle nous avaient habitués, entre autres, Raymond Aron ou le général Beaufre.

On peut voir à cela trois raisons :

L’avènement du nucléaire et du concept de dissuasion dans un monde bipolaire ont stérilisé la réflexion sur l’emploi des forces conventionnelles et ont limité les moyens qui leur étaient consacrés. Les séquelles des guerres de décolonisation dans lesquelles, à l’instigation du pouvoir politique, les forces armées françaises, engagées au-delà de leur emploi traditionnel, ont subi un traumatisme profond ; lequel a fait considérer comme sulfureux et inopportun tout écrit sur les actions psychologiques auprès des populations. Or, il faut bien reconnaître que les forces armées, impliquées depuis une dizaine d’années dans les missions de maintien et de rétablissement de la paix, sont presque totalement démunies dans le domaine de la stratégie d’influence et doivent redécouvrir laborieusement un corpus doctrinal dont la mémoire, non entretenue, a disparu. La prudence, voire la frilosité de la hiérarchie militaire, largement encouragée par les tutelles politiques successives, ont fait que tout officier développant publiquement une thèse non conforme à la ligne du moment a été sanctionné implicitement ou explicitement. Les plus brillants et les plus ambitieux ont rapidement compris qu’il était urgent de s’abstenir de participer à un tel débat.

Le champ de la réflexion a donc principalement mobilisé chercheurs, universitaires, hauts fonctionnaires civils dont les capacités intellectuelles, la puissance de travail, le sens de l’intérêt général ne sauraient être mis en cause ; mais aucune des publications correspondantes n’est véritablement imprégnée de l’expérience du terrain et du dernier regard du soldat, éventré par une balle explosive, un éclat d’obus de mortier ou de mine antipersonnel, interrogeant son capitaine : « toi, que j’ai suivi en toute confiance, l’enjeu de ce combat valait-il que je meure à vingt ans ? ». La diffusion d’idées nouvelles — et c’est là notre mission — est nécessaire au développement d’une réflexion qui pourra devenir pensée stratégique après avoir été critiquée et enrichie.

La revue Défense Nationale a pour ambition de devenir la structure d’accueil de cette pensée stratégique renouvelée, appliquée en priorité à l’Europe de la défense, voire à la défense de l’Europe le moment venu, tout en accueillant d’autres réflexions. Pour y parvenir elle procédera, par étapes, à une double ouverture : vers le monde de l’enseignement et de la recherche, vers l’Europe et vers l’Amérique.

Garante d’une ligne éditoriale indépendante elle souhaite que les militaires d’active de chacune des armées trouvent leur juste place dans ce vaste débat stratégique qui engagera notre avenir. ♦

Christian Quesnot

Revue Défense Nationale - Janvier 2001 - n° 627

La RDN vous invite dans cet espace à contribuer au « débat stratégique », vocation de la Revue. Cette contribution doit être constructive et doit viser à enrichir le débat abordé dans le dossier. C’est l’occasion d’apporter votre vision, complémentaire ou contradictoire. Vos réponses argumentées seront publiées sous votre nom après validation par la rédaction.

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